Le Taillevent, restaurant emblématique de Paris, a fait peau neuve. Il a rouvert ses portes le 17 septembre dernier, dans un décor redessiné et une toute nouvelle carte signée Giuliano Sperandio… l’élan du renouveau est engagé !
Le Taillevent, c’est LE Restaurant dans la grande tradition française. Dix lettres pour un nom élogieux qui revêtent le prestige de la haute gastronomie. La table est statutaire : souvenirs de plusieurs générations, alliances les plus formelles dans ce triangle d’or de Paris, destination unique pour les voyageurs gourmets.
Aujourd’hui, l’élan du renouveau permet de reconquérir le cœur des Parisiens. Le Taillevent nouveau, avec son histoire, son légendaire service et son excellence en tout point, rajeunit pour de bon avec un petit supplément d’âme pour l’ancrer dans notre époque : une belle impertinence, une féminité nouvelle et un Chef à la personnalité bien trempée. Une nouvelle modernité sans renier ce qu’il est !
Julia Dionisi, nouvelle Directrice Générale des Maisons Taillevent, résume parfaitement ce qu’est maintenant le restaurant : « Le Taillevent gagne en rondeur, en élégance d’esprit et en sensibilité. L’intention culinaire se décomplexe pour en faire à nouveau l’une des tables les plus désirables du triangle d’or ».
Giuliano Sperandio, un chef très inspiré et engagé
Thierry, Stéphane et Laurent Gardinier, dirigeants du Groupe Gardinier (fondé par Lucien Gardinier en 1927) en parle le mieux : « Avant même sa cuisine, c’est l’homme qui nous a plu chez Giuliano Sperandio. Il fait preuve d’une acuité intellectuelle et de valeurs humaines qui nous ont séduits. C’est un homme d’affection. Sa cuisine est à son image : à la fois créative, réfléchie et attachante. Giuliano a une personnalité forte mais a su endosser l’héritage traditionnel de notre Maison. Sa modernité est totalement en adéquation avec l’ADN du Taillevent et ce dialogue peut ainsi s’inscrire sur le long terme. »
Le chef Giuliano Sperandio prend la tête des cuisines du restaurant, succédant à Jocelyn Herland. Jeune mais rompu à l’excellence, Giuliano Sperandio possède cette impertinence dans la vision d’une institution et surtout dans l’approche de la cuisine. Dix ans d’improvisation auprès de Christophe Pelé à la Bigarrade puis au Clarence, le Chef s’émancipe… d’un électron libre, il endosse le rôle de « passeur ». Passeur, car plus que porter le poids de l’héritage, il souhaite exalter l’histoire de cette Maison… qui deviendra sans coup férir l’une de ces adresses au plaisir spontané, naturel et décomplexé.
Le chef Giuliano Sperandio, à la tête bien faite, raconte : « J’ai toujours cuisiné dans une totale liberté d’esprit et d’exécution, poussant et repoussant le champ de la créativité jusqu’à ce que l’envie d’un ‘cadre’ moteur se fasse ressentir, jusqu’à ce que l’opportunité de ressusciter toute la substance moelle d’une Maison historique me soit offerte. Le Taillevent a fait rêver des générations de cuisiniers et aujourd’hui encore, c’est une référence dans l’histoire de la haute gastronomie auprès de tous les jeunes chefs dans le monde. Il ne tient qu’à nous qu’elle retrouve son panache qui force sa légitimité depuis 1946, et qu’elle montre toute la modernité dont est capable la cuisine bourgeoise ».
Une cuisine sensible mais au service de la mémoire
Moderniser pour moderniser, n’est pas dans la façon de procéder du nouveau chef Giuliano Sperandio. Avant tout, il s’est plongé dans l’histoire de la Maison car il entend respecter l’esprit du Taillevent tout en restant fidèle à sa vision… volontairement imparfaite même si la cuisine se nourrit de sens, d’assaisonnements, de garnitures travaillées. La technique s’efface devant l’évidence du produit : le bœuf soyeux s’offre une coupe épaisse, l’huitre se sert à tous les stades de maturité… un engagement pour l’artisan et le plaisir « d’éclairer » ses hôtes. Il préfère l’instinct et le ressenti à aux excès de perfection et de style qui brident la créativité et l’émotion.
Les plats emblématiques s’offrent une nouvelle signature : le boudin de crustacés puis de homard retrouve fraîcheur avec des langoustines juste tiédies servies sur un lit de courgettes ; la quenelle laquée à la sauce Nantua est parfumée d’un poivre de verveine, émulsion de crustacés servie à la minute en salle. Mais le Chef veut un fil conducteur solide, travailler le palais crescendo et à bon escient : à chaque entrée son amuse-bouche, à chaque produit élargir le champ des possibles : cru, snacké, assaisonné, à force d’herbes et d’aromatiques qui viennent révéler les multiples personnalités d’un même énoncé.
La chef pâtissière, Emilie Couturier, est exigeante. Après un apprentissage au Domaine Les Crayères, c’est au Clarence qu’elle rencontre Giuliano Sperandio. Elle a une pâtisserie de l’instinct, sans carte et en totale improvisation. Si la Maison garde trois desserts iconiques (crêpes Suzette et deux soufflés), la jeune chef va surprendre avec d’autres saveurs et textures. Comme pour le Chef Giuliano Sperandio, elle a cette démarche de privilégier un fil rouge… une fantaisie d’équilibriste comme le crémeux d’un riz au lait à la noix de coco, accompagné d’une bille de meringue à la crème vanille et confit de citron ou une glace au lait de riz pour le pschiiiit de fraîcheur. Le dessert reste digeste sans regretter d’y avoir cédé.
Service à la française
Le Taillevent a bâti sa réputation sur un service d’excellence et d’exigence… des rituels qui sont plus qu’un énoncé de plat mais une démarche d’attentions exclusives et d’échange, le chef Giuliano Sperandio a pensé la nouvelle carte de cette manière. C’est dans la salle que se déroule le dernier tour de magie d’une recette : découpes, flambages, assaisonnements délivrés à la minute ou décanter le vin à la bougie… l’intelligence et la noblesse de la main.
Depuis début 2020, Baudouin Arnould est le nouveau directeur du restaurant. Il offre toute la mesure de son talent, son sens du détail et du savoir recevoir… élégance dans la discrétion tout en conservant une forme de convivialité indispensable au plaisir.
(Re)venir au Taillevent, c’est désormais s’offrir un peu du patrimoine sans en subir les lourdeurs, sans préjuger d’une table élitiste et ronronnante. L’alliance de Giuliano Sperandio et du Taillevent, c’est le mariage de la carpe et du lapin pour le meilleur.
André Tirlet