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Le Queen MARY II Héritage transatlantique

Le Queen MARY II Héritage transatlantique

Il faudra attendre le 12 janvier 2014 pour voir le Queen Mary II – le plus gros, le plus long, le plus haut, le plus large et le plus cher navire de passagers de tous les temps – quitter son port d’attache de Southampton pour son voyage inaugural. Cela reste aujourd’hui l’une des grandes expériences de voyage de notre siècle.
PAR PASCAL FALCONE

Al’aube du XIXe siècle, les premiers bateaux vapeur à coque de bois qui s’aventurent
dans les dangereuses eaux de l’Atlantique Nord sont dépourvus de tout confort. L’audacieux voyageur doit s’armer de courage pour arriver à destination sain et sauf, et prier pour qu’il n’attrape pas une grave maladie durant les 25 jours de traversée. Les
pires conditions sont pour les passagers de l’entrepont. L’hygiène est déplorable à bord. On disait qu’un quart des passagers ne survivait pas à la traversée. C’est le 20 juin 1819 que le Savannah, un voilier de 320 tonneaux, doté de roues à aubes et d’une chaudière, traversera l’Atlantique en 24 jours, sans aucun passager à son bord. Une prouesse pour l’époque. Il faudra
attendre le 8 avril 1838 avec le Great Western pour offrir un certain confort et une décoration, mais aussi des performances de vitesse pour l’époque : 15 jours, 10 heures et 30 minutes. La course au Ruban Bleu est lancée. Un temps, ce Ruban Bleu sera pris par le Colombia de la Cunard. Cette compagnie anglaise fait parler d’elle et pour longtemps. Samuel Cunard ouvrit
l’éponyme compagnie transatlantique pour assurer une liaison régulière afin d’assurer le commerce du coton, ainsi que le courrier entre l’Angleterre et l’Amérique. La compagnie portera dans un premier temps le nom de la Royal Mail Steam Packet Company. Voilà 181 ans d’histoire maritime incarnée par Samuel Cunard, un descendant d’émigrés anglais installés à
Halifax. Le Britannia sera le premier navire à vapeur de la Cunard, une légende qui inspira Jules Verne dans son
livre culte “Vingt mille lieues sous les mers”. De grands hommes et d’éminentes femmes firent la Une des tabloïds, tels Clark Gable, Elizabeth Taylor ou Jackie Kennedy, et Sir Winston Churchill distingua pour toujours ce fleuron de la Couronne qui avait écourté la guerre d’une année “en transportant plus d’un million de soldats”

Queen MARY II : le navire des superlatifs

Il faudra attendre le 12 janvier 2014 pour voir le Queen Mary II – le plus gros, le plus long, le plus haut, le plus large et le plus cher navire de passagers de tous les temps – quitter son port d’attache de Southampton pour son voyage inaugural. Un navire attendu par la foule dans les ports où il fait escale. Il a un petit bout de France, car la Cunard (Groupe Carnival) l’a commandé
aux chantiers de St Nazaire. Sa ligne est celle d’un paquebot Transatlantique. C’est un liner unique en son genre, reconnaissable à sa coque noire et rouge. Il est plus haut que la statue de la Liberté, sa longueur est l’équivalent de 41 bus londoniens alignés, il peut embarquer 2 620 passagers et 1 300 membres d’équipage, dans un luxe jamais égalé. Un grand lobby de trois étages, des restaurants gastronomiques, des cabines spacieuses, un service de grands hôtels de luxe, des animations et soirées avec des artistes internationaux… c’est une légende fendant les mers à plus de 22 nœuds. Faire le choix de vivre l’une des grandes expériences de voyage de notre siècle sera conditionné par le tarif, certes, mais celui-ci est relatif quand on sait que l’on en aura pour son argent et que la qualité à bord est le maître mot. Les extras ne sont pas excessifs (pourboires, forfaits boissons à partir de 15$/jour, Internet…). De plus, il y a des cabines intérieures à quatre pour les familles et amis. Sur quel navire pourrez-vous prendre un petit-déjeuner en cabine, un déjeuner avec sashimi à volonté, une crème glacée à l’italienne, un thé time, puis dîner dans un restaurant gastronomique pour ensuite finir par un spectacle et une
nuit en discothèque, sans payer aucun supplément ? La qualité des repas à bord est exceptionnelle. Le personnel est adorable et une hôtesse française est là pour nos compatriotes un peu perdus.

Lâcher prise

On retient aussi le grand silence du navire, un système d’air conditionné parfait et une grande stabilité lors des mers déchaînées. On s’étonne de ne pas subir un effet de foule avec 2 620 passagers à bord, comme de ne jamais avoir à faire la queue. Revêtir une robe de soirée, mettre un nœud papillon, pour se fondre dans le décor ou se faire remarquer, n’a
rien de pesant, bien au contraire. Mais il est tout aussi possible de s’habiller de façon décontractée et de prendre ses repas au restaurant libre-service principal. Y’a-t-il de l’ennui à bord ? On pourrait le croire avec six jours de mer lors d’une traversée transatlantique mais en fait, pas du tout ! S’installe plutôt une petite angoisse, celle de ne pouvoir tout faire parmi les activités, de ne pas explorer le navire, de ne pas arriver au bout de son roman… mais aussi de devoir bientôt quitter les personnes avec qui nous avons sympathisé, venant, avec leur histoire, des quatre coins du monde. Des gens souvent
simples, amusants. Quelques-uns sont à bord par peur de prendre l’avion et l’on croise souvent des “repeters”. Et si nous devions trouver un bémol, ce serait alors la qualité des lits, mais cela ne tient qu’à notre expérience personnelle. Et peut-être aussi un manque de diversité dans les articles et marques proposés dans les boutiques.
Vivre une transatlantique sur le Queen Mary II, c’est un voyage qui vous change la vie, un lâcher prise, une invitation à la réflexion, à l’introspection, une expérience qui crée même un manque et un désir : celui de retourner sur son pont et d’observer un horizon infini.